à Prangin 25 xb [1754]
Depuis la dernière lettre monsieur que j'ay eu l'honneur de vous écrire j'ay fait de profondes réflexions sur la négligence des débiteurs et j'ay conclu qu'il serait très possible que je n'eusse point d'argent d'icy à paques, attendu la façon dont la nature humaine est faitte.
Ainsi sauf votre meilleur amis je croirais qu'il serait fort à propos que vous voulussiez bien dans vos arrangements me garder toujours une somme de douze mille livres pour faire face aux différents besoins qui peuvent survenir. Je peux acheter des chevaux, des meubles, et en ce cas je donnerais pour le payement des mandements sur vos correspondants de Geneve.
J'ay encor une lettre de change considérable de Mr de Montmartel, mais elle n'est que pour le mois de septembre prochain. C'est pourquoy je ne vous l'ay pas remise. Je pourais m'en servir s'il était question de quelque acquisition.
Oserais-je monsieur prendre la liberté de vous demander quelque marchand expéditionaire de Lyon qui pût m'envoier quelques provisions, dont on a toujours besoin et qui coûtent baucoup moins cher à Lyon qu'à Geneve? Par exemple j'aurais besoin pour mon hiver de 50 livres de bougie et je ne sçais comment faire.
Je vous remercie des bonnes nouvelles que vous m'avez données de m. David du Mont, mais je n'en reçois aucune de luy. Je n'ay pas grande espérance de la négociation de Cadix, mais au moins je prierai mrs Gilly de me faire tenir tous les retours entre vos mains sans plus rien mettre en risque. Cela durera tant qu'il plaira à dieu. Voulez vous bien avoir la bonté de donner cours à l'incluse.
De tout mon cœur v.t.h. et ob. serv.
V….