à Montbeliard du 8 févr 1754
Monsieur,
Je Viens de recevoir Une Lettre de M. de Voltaire datée à Colmar du 28 du mois passé. Les Certificats de Vie que Vous lui demandés à chaque payement de sa Rente ne sont pas de son goût, il me propose de le dispenser de cette formalité génante, il s'offre de Vous remettre à chaque payement des quitances et de Vous écrire Une Lettre de sa main. Tant qu'il restera soit à Colmar soit dans la Province d'Alsace et qu'on puisse être assuré de son existence, il est inutile et même superflu de lui demander des Certificats de Vie. J'ai eu l'homeur de Vous le marquer il y a quelques jours, que Vous pouvés Vous contenter des quitance[s] qu'il Vous donnera pendant le tems qu'il restera dans le Voisinage; et au cas que Vous Comoissiés bien son écriture, il n'y a pas non plus à balancer de lui faire les payemens de sa Rente en Vous écrivant des Lettres et en Vous donnant des quitances de sa main scellées avec son cachet. Si même il se transportait plus loin pourvû que Vous soyés toujours assuré de sa demeure, il y a d'autant moins à craindre qu'on ne se trouvera jamais dans le cas de payer cette rente Viagère après la mort de M. de Voltaire, à Une personne qui n'a point de droit de la toucher, parce q3 suivant toute aparence on en sera tout de suite informé par les Gazettes publiques; d'ailleurs il entrera dans aucun payement qu'aux termes de l'échéance, de manière que nous ne lui ferons jamais des avances. Si pourtant vous pouviés le disposer de bonne manière de Vous procurer des Certificats de Vie au cas qu'il s'éloigne de la Province d'Alsace Vous ne négligerés point de lui en faire des représentations. Vous Verrés par les extraits cy joint ce qu'il m'a écrit et la réponse que je lui ai domée par raport à ces Certificats.
J'ai l'honneur d'être très parfaitement
Monsieur
Votre très humble et obéissant serviteur
Rd Gemingen