1750-11-18, de Voltaire [François Marie Arouet] à Georg Conrad Walther.

Mon cher éditeur, je n'ay travaillé que pour vous depuis que je vous ay écrit. Il n'y a aucune pièce de ma façon que je n'aye corrigée, que je n'aye retravaillée avec soin.
Dites moy positivement quand vous voulez recommencer une édition nouvelle. J'espère que vous prendrez autant de soin que j'en prens moy même, que vous corrigerez vos fautes comme moy les miennes. Et que vous ne vous repentirez pas de vos peines. Renvoyez moy je vous en prie l'exemplaire dont vous ne faites point encor usage, et sur le quel j'ay fait tant de changemens. Je veux porter sur cet exemplaire tous les autres changements que j'ay faits depuis. Je vous donneray encor la tragédie de Rome sauvée. J'ajouteray plusieurs chapitres historiques assez curieux. Je mettray partout des renvois qui vous feront connaître où chaque pièce doit être placée. Enfin quand vous aurez commencé votre nouvelle édition je viendray vous voir à Dresde. Le roy mon maître ne poura m'en refuser la permission.

J'ay vu dans votre catalogue des titres infâmes. Un honnête homme ne doit pas débiter de telles marchandises. La Voltairomanie, et les autres sottises de la canaille doivent être brûlées. Ce n'est pas à vous à vous souiller de ces horreurs.

Envoyez moy

  • Les révolutions de France de la Hode. 3 vol.
  • Du sistème, avec la vie du régent. 6 vol.
  • Négociations de Destrades, Colbert, Davaux. 9 volumes

Tout cela m'est nécessaire pr l'histoire du siècle de Louis 14. Je ne partirai peutêtre pas sitost que je croiois. Je vous prie instamment de vous informer sur le champ si m. le marquis des Issars a reçu une boete que je luy ay envoyée de Potsdam par le chariot de poste. Adieu mon cher éditeur, songez je vous prie aux livres que je vous demande, et à la boete de Monsieur L'ambassadeur de France. Je vous embrasse.

Voltaire