[c. 15 December 1746]
Il est monsieur de la plus grande importance comme de la plus grande justice que vous vouliez bien réparer le tort que vous m'avez fait contre votre intention dans cette lettre que vous avez imprimée.
Elle sert de preuve contre moy, et vous négligez aujourdhuy une affaire dans la quelle Juvigni va tous les jours luy quatrième invectiver contre vous chez tous les juges. Il seroit bien nécessaire que vous prissiez la résolution de les aller tous voir, vous détruiriez aisément les impressions odieuses qu'on leur donne de votre conduitte: votre honneur vous engage à confondre des calomnies que le préjugé reçoit avec avidité. Pouvez vous soufrir qu'on qualifie des noms de perfidie, de noirceur etc., une action que vous n'avez faitte que par un pur motif de générosité et de bonté? et n'est il pas nécessaire que vous fassiez connaître aux juges les scélérats méprisables qui vous attaquent avec tant d'insolence? Je vous prie de m'envoyer un mot que je puisse montrer à Mr l'avocat général. Vous pouvez certifier que lors que vous me fites l'honneur de venir chez moy le 11 ou 12 juin à la prière de quelques personnes, pour m'engager à solliciter avec vous la grâce d'un nommé Travenol je vous dis que je ne connoissois pas cet homme, et que je n'en avois jamais entendu parler, que cependant je vous accompagnay chez le magistrat de la police, que nous demandâmes l'un et l'autre à ce magistrat, ce que c'étoit que cet Antoine Travenol et pour quoy il étoit en prison, que M. de Marville nous répondit qu'il étoit arrêté par ordre du roy, que vous demandâtes sa grâce sans le connaître, que j'appuyay votre sollicitation, et que c'est toute la part que vous avez euë à l'affaire de cet homme.
Rien n'est si vray, rien n'est si simple, rien n'est plus nécessaire pour mettre à son aise mr l'avocat général au quel il doit toujours rester quelque soupçon tant que vous ne détruirez pas ce que vous avez hazardé dans votre lettre imprimée sur la foy d'un menteur comme Travenol fils; la chose presse, je vous suplie de m'envoyer le certificat pour que je le fasse tenir sur l'heure à M. l'avocat général. Je ne peux sortir ayant pris médecine.