1744-01-30, de — de Frecinne à Voltaire [François Marie Arouet].

Monsieur,

Vous me permettrez de vous dire que si je ne vous fesois pas part de la réception de votre lettre communiquée a melle Jonquet, que je taiserois La visiter aussitôt qu'el m'a été rendeû.
J'en ay fait La lecture tout au Long. Comme je la Lisois avec un peu de vitesse, et mesme avec précipitation, je ne m'apercevois pas que La ditte delle fondoit en larme en voiant L'amitié que vous vouliez bien Luy accorder. Aprais Luy avoir Lessé rendre à la nature ce qu'elle se sentoit Luy devoir rendre elle en vient au solide, elle me dit qu'elle alloit se mettre en prière pour votre Conservation. En effet Le lendemain je la trouvé qui alloit fe Commencer une neuvenne avec une de ses bonnes amis, dans une chapelle de notre dame fort en vénération dans Ce pais. Je l'ay fort loué et aprouvé de Cette action. Je souhaite que ses veux soient bien reçus du Ciel.

Vous m'avez fait L'honneur de me marquer que si je vous avoit donné Le moié de faire tenir quelque chose à cette bonne personne vous auriez suivis mon intention. Vous vous este aperçu, que C'étoit une lette azardée, mais, celle cy que vous voudrez bien recevoir avec La mesme bonté vous indiquera de quelle façon vos Libéralitez et Celle de morvotre frères parvienderont jusque elle. A L'occasion de mr votre frère une petite réflection. Ce bon mr peutestre se resouviendra t'il ce tres. Un jour mr vr père et me sa mère s'étant aperçu qu'il avoit les dans gastés et ne pouvant Le résoudre à les faire arracher, on se servit de La douceur de mlle Jonquet, elle Le gagna par un Louis et aprais L'avoir un peu animé par trois ou q. coups de vin de champagne, elle Le Conduisit chez L'aracheur de danps et qui Luy netoia La bouche sans Luy faire de mal. Il eut tant de reconnoissance de La bonne attention de Cette demllequ'il vouloit en s'en retournant au Logis La faire entrer chez le pâtissier et la Luy faire choisir Ce qui seroit de son goust. Peutestre direz vous que ce ne sont pas des choses qu'il fault raporter n'en mérittant pas la penne. Vous avez bien eu attention pour ce qui estoit dans La première. Je Crois qu'il en sera demesme de la seconde. Vous m'avz marqué que vous alliez mettre 50ltau coche. Ce ne peut estre que au coche d'Amboise chez le sr Liger, directeur des carosses. Si vous L'avez fait ou ailleurs aiez la bonté de m'en donner avis affin que je Les retire des mains où ils sont. Si vous voulez bien Continuer vos bonnes volontez vous paieré à L'hostel des fermes à Paris ce que vous jugerez àpropost, la quelle vous donnera une Lettre de change sur Montrichard au grenier à sel, Lieu de la résidence de La demoiselle, et de la mienne. La poste y passe égallement pour la Lettre et Couriers. On trouve difficilem͞ àprésent vos ouvrages, sur tout votre Hanriade. Si vous aviez la bonté de me La faire tenir par Le coche d'Amboises adressé au sr Liger, avec autres de vos ouvrages je serois exacte à remettre ce qu'il Conviendera. Je vous avoüe qu'on ne seroit Lire rien qui flatte davantage. Pardon si j'en agis si Librement. Pourquoy este vous de si bon Coeur?

J'ay l'honneur d'estre avec toutte La vénération possibé

Monsieur

Votre très humble et très obéissant serviteur

F. Defrecinne Curé de [?Laleu]