à Bruxelles ce 18 aoust 1741 par Lisle
Monseigneur,
Il ne m'apartient pas d'oser demander des grâces à votre Eminence.
Si quelque chose peut excuser à vos yeux cette liberté, c'est le bien du service qui se joint peutêtre à mes respectueuses prières. Le sr Denis mon neveu, longtemps officier dans le régiment de Champagne, et actuellement commissaire des guerres à Lisle, ayant servi en Italie, et fait les fonctions de commissaire ordonnateur, demande à l'être en effet, et à servir en cette qualité. J'ose suplier votre éminence de vouloir bien se faire informer par Monsieur le maréchal de Coigni, et monsieur de Fontanieu, s'il a en effet rendu des services, et s'il est capable d'en rendre. Monsieur de Breteuil, après s'être informé de luy, poura rendre compte à votre Eminence que je ne l'importune pas pour un homme indigne de ses bontez.
J'attends sans doute baucoup plus des informations qu'elle peut faire, que de mes suplications, cependant Monseigneur s'il étoit possible que vos bontez pour moy entrassent un peu dans la grâce que mon neveu demande, j'avoue que jamais je n'aurois été si flatté.
Je n'ay pas besoin Monseigneur de cette nouvelle bonté pour être véritablement attaché à votre personne. Il suffit d'être français, et il est impossible de n'avoir pas un cœur infiniment français sous un tel ministère.
Je suis avec le plus profond respect, et le plus sincère dévouement,
Monseigneur,
de votre éminence,
le très humble et très obéissant serviteur
Voltaire