1740-12-05, de Gabrielle Émilie Le Tonnelier de Breteuil, marquise Du Châtelet-Lomont à Johann Bernoulli.

Ie compte voir le roy de Prusse incessament Monsieur, et ie ne désire d'auoir quelque voix sur le choix des académiciens dont il veut composer vn corps digne de faire le second tome de celui de Paris, que p͞r faire rendre justice à votre mérite.
Mr de Maupertuis qui Est actuellement à Vezel v͞s seruira peutêtre plus vtilement que moi, mais pas sûrement auec plus d'enuie de v͞s marquer l'estime et l'amitié que i'ay p͞r v͞s. Ie compte aller à Cirey vers le mois d'octobre et d'y passer 2 ou 3 mois. Ie serois infiniment flattée que v͞s pussiés y venir passer ce tems auec moy, et i'ay bien Enuie de prier le roy de Prusse de mettre cette condition dans le marché. I'ay Encore parlé de vous à mr de Camas qui a passé par icy en allant de Paris à Cleues, et ie ne doutte pas que v͞s n'alliés à Berlin, trouuer vn roy qui aime et protège tous les arts, et qui sait connoitre et récompenser le mérite. I'ay vu mr de Maupertuis en passant ici. I'ay eü p͞r lui vne amitié trop véritable p͞r auoir pu le reuoir sans me racomoder auec lui. Ie souhaitte seulement que le retour de mon amitié lui ait fait autant de plaisir que i'en ay eü à la lui rendre. Ie suis bien plus sûre qu'il a fait le liure de la figure de la terre depuis que ie l'ay vû. I'aurai encore le tems de receuoir votre lettre ici. Adieu mons[ieur,] comtés toujours sur les sentim͞s auec lesquels ie suis Votre très h. et t. ob. seru.

Breteüil du Chastellet