A Paris ce 30 décembre 1738
Monsieur,
J'ai déjà eu l'honneur de vous écrire le 20 du présent mois dans l'amertume de mon cœur, pour vous demander pardon, & pour vous marquer le sincère repentir que j'éprouve du procès injuste que votre ennemi que vous connaissez, m'avait engagé de vous intenter.
Je vous ai déjà marqué mon regret, & l'horreur que j'ai d'avoir attaqué si cruellement celui qui était mon bienfaiteur. Je vous disais que j'avais reconnu l'erreur où l'on m'avait mis. Soyez sûr, monsieur, que mon affliction est égale à ma faute. Daignez pousser votre générosité jusqu'à m'accorder le pardon que j'ose vous demander. Je désavoue le factum injuste & calomnieux que l'on a mis sous mon nom, & que j'ai eu le malheur de signer. J'étais aveuglé, on m'a séduit. Je vous le répète encore, j'en suis au désespoir; j'en suis tombé malade; il n'y a rien que je ne fasse le reste de ma vie pour réparer ma faute. Enfin, monsieur, si vous étiez témoin de mon affliction d'avoir été trompé par de mauvais conseils, vous auriez pitié de mon état. Ayez la bonté au moins de me faire dire que vous avez celle de me pardonner, si vous ne daignez pas m'écrire de votre main. Je payerais tous les frais du procès, si j'avais de l'argent; & il n'y a rien que je ne fasse tout le reste de ma vie, pour vous témoigner en particulier & en public le repentir, l'admiration pour votre caractère, & le très profond respect avec lequel je suis,
monsieur,
votre très humble & très obéissant serviteur,
Jore