à Paris ce vendredi au soir [1er may 1733]
Le paresseux De L'aunay est la plus platte pièce qu'on puisse imaginer mon cher ami, elle a été Reçue Comme elle le méritoit, C'est à dire qu'on Bailloit, Les Bras tomboint, enfin on étoit dans une Langueur qui ôtat même La force de siffler, on s'en allat sans songer à se parler de La pièce.
On n'en a pas parlé davantage Depuis et je n'ay jamais vu D'autheur inspirer plus de Discrétion sur son compte.
J'ay vu aujourdhuy V. Il m'a quitté pour aller trouver mr Rouillé parce qu'il y a encor quelque anicroche pour son Temple qui est cependant sous presse.
J'ay Rencontré à la fin Les Frequiennes. Je dois diner avec eux Lundi et de là aller ensemble à Omphale et mardi j'iray à La campagne passer quelques jours. Je compte ensuite me préparer pour mon Retour. Ainsi si vous ou nos amis avés quelques ordres à me doner il est temps de parler. En attendant je Les embrasse. Je ne vous ay point envoyé les paroles de L'empire De L'amour car ce n'est rien qui vaille, de L'esprit quelque fois mais hors de place et L'impression toujours manquée.
On voit icy une instruction de mr de Montpellier que Le conseil vint de suprimer. Cette pièce est singulière par L’éloquence et L'adresse et surtout par un paralelle des miracles de J. C. et ceux de mr Paris qui est fort scandaleux car cela ne prouve pas ceux du nouveau saint et seroit capable d'afoiblir Les autres s'il y avoit des gens assés pervers pour en Douter. Adieu mon ami, je vous embrasse de tout mon coeur.