[c.25 December 1732]
Vos confitures ont été reçues avec reconnaissance, et vos vers avec transport, comme vous le seriez vous même.
Ils vous ressemblent, mon cher Formont, ils sont pleins de justesse et d'esprit. Tout le monde croira avec raison que si je ne vous réponds qu'en prose, c'est parce que je sens mon impuissance et que je me défie de moi. Mais il y a encore une autre raison, c'est que je n'ai pas un instant dont je puisse disposer. Je retouche les lettres anglaises pour vous les renvoyer. Je viens de finir le temple du goût, ouvrage que j'aurais dû dédier à vous et à m. de Cideville, si m. le cardinal de Polignac et m. l'abbé de Rhotelin ne me l'avaient pas demandé. Je le fais partir par la poste et je pars dans l'instant pour Versailles, où l'on m'adresse les préfaces de Zaïre. Vous autres qui avez un peu plus de loisir, écrivez nous de longues lettres, à nous misérables qui n'y pouvons répondre qu'en billets écourtés. Mandez un peu ce que vous pensez du temple du goût, car après tout, messieurs, c'est votre affaire; et il s'agit de votre dieu et de votre église. Vous êtes les apôtres de la religion que je vais prêchant. Dieu veuille que vous ne me traitiez pas d'hérétique. Adieu.
V.