[January 1731]
Vous sçavez peutêtre Monsieur qu'il m'arriva il y a plus de deux ans le même malheur au sujet de la Henriade, que je viens d’éprouver par raport au roy de Suede.
On me saisit à Calais les exemplaires que je destinois à ceux qui avoient souscript en France. J'ay été un peu plus heureux, ce mois cy. Il vient de m'arriver un ballot d'exemplaires de la Henriade. C'est une nouvelle édition in octavo avec Baucoup de Changements, une préface assez considérable et des nottes. Je fais travailler aussi à une autre édition in quarto, ornée de planches; mon dessein est de faire délivrer l'une et l'autre aux souscripteurs, sans qu'il leur en coûte rien afin de les dédommager d'avoir attendu si longtemps un ouvrage qui méritoit si peu de se faire attendre. Comme vous avez eü la bonté monsieur de me procurer quelques souscripteurs, je prends la liberté de vous supplier de me faire sçavoir leurs noms afin que je m'acquite de mon devoir envers vous et envers eux. Je leur envoyeray ce que j'ay, et je me hâteray, de peur qu'on ne me saisisse encore.
Je suis avec toutte l'estime et tout l'attachement possible
monsieur
Votre très humble et très obéissant serviteur
à Paris rue de Vaugirard vis à vis l'académie de la Gueriniere
Voltaire