1726-02-15, de Mathieu Marais à Jean Bouhier.

Je vous envoie une pièce de vers toute fraîche contre m. de Fontenelle: cela est fort malin, et la prescription de quarante ans, quadraginta annorum, n'a servi de rien contre la critique: c'est pis que des coups de bâton.
On ne parle plus de ceux de Voltaire, il les garde: on s'est souvenu du mot de m. le duc d'Orléans à qui il demandait justice sur pareils coups, et le prince lui répondit: On vous l'a faite. L’évêque de Blois a dit: Nous serions bien malheureux si les poètes n'avaient point d’épaules. On dit que le chevalier de Rohan était dans un fiacre lors de l'exécution, qu'il criait aux frappeurs. Ne lui donnez point sur la tête, et que le peuple d'alentour disait: Ah! le bon seigneur! Le pauvre battu se montre, le plus qu'il peut, à la cour, à la ville, mais personne ne le plaint, et ceux qu'il croyait ses amis lui ont tourné le dos. Le bruit court que le poète Roy a eu aussi sa bastonnade, pour une épigramme qu'il avait fait contre des gens avec qui il devait souper et qui lui firent fermer la porte. Enfin voilà nos poètes:

Formidine fustis
ad bene dicendum delectandumque redacti . . . .