à Cramfort ce dimanche [October 1725]

Madame,

N'espérant pas d'avoir l'honneur de vous voir je vous envoye les comissions dont vous m'avés chargée.
Je souhaitte qu'elles soient à votre gré. Sy l’écharpe ne vous plaisoit pas je pourrois m'en deffaire. Oseroije à mon tour vous supplier de m'aquitter d'une chose qu'on m'avoit prié de faire? Elle ne sçauroit estre sy bien placée qu'entre vos mains madame, vous aimés l'esprit et le mérite et vous este plus capable d'en juger que personne. Acordé donc je vous prie vostre protection au seul poète françois que nous ayons à présent et ayés la bonté de présenter à s. A. R. madame la princesse une tragédie qu'il vient de faire imprimer et dont il a pris la liberté de luy destiner cet exemplaire. Le succès que cette pièce vient d'avoir à nostre cour flattera moins l'auteur que ne fera l'aprobation de s. A. R. s'il est assés heureux pour l'obtenir. L'amitié que j'ay pour luy me fait désirer qu'il puisse avoir aussy la vostre madame. C'est un bien que je désire pour moy même et dont je fais tout le cas qu'il mérite vous honnorant madame très parfaitement. Come ma lettre n'est pas un acte publique je croy que je puis la signer en vous assurant que je suis avec respect Madame vostre très humble et très obéissant servante

M. C. Bolingbroke