1717-05-10, de Salenne de Beauregard à Marc René de Voyer de Paulmy, marquis d'Argenson.

Je le vis trois jours après chés luy rue de la Calandre au pagnier vert où il me demanda ce que l'on disoit de nouveau. Je luy répondie que il y avoit paru quantité d'ouvrage sur mr le duc Dorleans et madame duchesse de Bery. Il se mit à rire et me demanda sy on les avoit trouvé beaux. Je luy a dit que l'on y avoit trouvé beaucoup d'esprit et que on luy metoit tout cela sur son conte mais que je n'en croiois rien et que il n'étoit pas possible que à son âge on peut faire de pareilles choses. Il me répondit que j'avois tort de ne le pas croire que c'étoit luy véritablement qui avoit fait tous les ouvrages qui avoient parue pendant son absence (j'ay remis à monsieur Leblanc tous ces ouvrages) et que pour empêcher que mr le duc Dorleans et ses ennemis ne crusent que c'étoit luy qui les avoit fait il avoit quité Paris dans le carnaval pour aler à la campagne où il a resté deux mois avec mr de Comartin qui a veüe le premier ses ouvrages après quoy ils ont été envoyé à Paris.

Il me dit que puisque il ne pouvoit se venger de mr le duc Dorleans d'une certainne façon il ne l'épargneroit pas dans ses satires. Je luy demenday ce que mr le duc Dorleans luy avoit fait. Il étoit couché en ce moment et se leva comme un furieux et me répondit, coment vous ne sçavés pas ce que ce boug. là m'a fait? Il m'a exilé par ce que j'avois fait voir au publique que sa Messaline de fillie étoit une putin.

Je sortis et y retourne le lendemain où je trouve mr le conte Dargenteuil. Je sortis de mes tabletes le puero regnante. Il me demanda sur le champs ce que j'avois là de curieux. Je luy montré. Quand il eut veu ce que c'étoit, pour celui là je ne les pas fay chés mr de Comartin mais beaucoup de temps avant que je parte.

Deux jours après gy retourné où je trouve encore mr le conte Dargenteuil. Je luy dit, coment mon cher amy vous vous ventés d'avoir fait le puero regnante pendant que je viens de sçavoir d'un bon endroit que c'est un professeur des jésuistes qui l'a fait. Il prit son sérieux là dessus et qu'il ne s'embaroisoit point sy je le croiois ou sy je ne le croiois pas et que les jésuistes faisoient comme le geay de la fable, qu'ils empruntoint les plumes du pand pour se parés. Mr le conte Dargenteuil étoit présent pendant tout cela. Il nous dit en continuant que Madame duchesse de Bery alloit paser six mois à la Meule pour y accoucher. Il a répandu se discours dans tout Paris et quantité d'autres que le papier ne sçauroit souffrir. Nous nous sommes souvant trouvé ensemble avec mr Dargenteuil où il a tenu tous les mesmes discours qui sont contenu dans se mémoire.