Je combast depuis longtemps, Monsieur, avec moymême pour faire ce que le coeur ne cesse de me dicter.
Voilà le fait: J'ay perdu mes Parants, mes amÿs et mon Bien, de sorte qu'il ne me reste plus qu'une femme, des Enfants et de l'envie de m'ocuper; feu Mons. le comte Dargenson, mon melieur amÿ, et mon protecteur chez qui J'ay Eu L'honneur de vous voir aux Ormes, m'avoit consellié de travailler aux mémoire par forme de projet pour donner une nouvelle forme au corps de la maréchaussée de France dans lequel Je suis attaché En qualité de capitaine Lieutenant; ce Ministre m'avoit promis de trouver moÿen de le faire passer directement à Monsieur le duc de Choizeuil et de le faire apuÿer sans y paroitre. Comme plusieurs officiers de différants corps En ont présanté quoy que Bons sans succez autant auroit il fallu me Reposer que de faire essuyer le même sort au mien. Je ne vois cependant d'autres moÿens n'ayant aucune connoissance auprès du ministre que de m'adresser à vous, Monsieur, pour Vous prier au nom de feu cet amÿ commun M. Dargenson, de me sacrifier un moment et de m'en Envoyer le fruit, c'est à dire quelque Besogne dictée par Vous qui luy anonçast mon travail, une Lettre où Vous peinderiez avec l'esprit dont Vous Este capable, tout le sien, toute sa gloire, les services qu'il rend à l'état, En aprouvant avec Raison le changement qu'il a fait dans le ministaire, et particulièrement dans le militaire, en lui représentant L'importance de refondre le corps de la maréchaussée et combien elle seroit honnorée et flattée s'il voulloit En Estre le colonel général. Vous sçavez mieux que moy Mon cher Monsieur tout ce qu'il faut dire. Un seul Mot vous aprand tout le Reste, trop heureux sy vous voulez bien prandre le temps de lire ma lettre, y Répondre, ce dont Je me flatte cependant sy vous Voulez bien vous ressouvenir des politaisses dont Vous m'avez comblé aux Ormes et à Paris En Echange de celles dont Je me faisois Gloire de vous faire puisque Je ne pouvois me vanger autrement de vos grands talans. Je vous seray Monsieur redevable de mon sort et l'état d'un Bien Infinnÿ que vous luy fairez pour le second puisqu'après luy avoir prodigué tant de Bons et de Baux ouvrages vous luy procurerez la tranquilité, et la paix Intérieure.
Je suis avec un très respectueux attachement
Monsieur,
Votre très humble humble et très obéissant serviteur
Joly de Varenes
Bourges, ce 16 Juillet 1765
Mon adresse Joly Devarenes, capitaine de cavalerie, lieutenant Comandant les Maréchaussées de Berry à Bourges.