1853-09-17, de Louis Pasteur à A SON PÈRE..

Mon cher papa, Je suis arrivé avant-hier et j'ai reçu hier la lettre que tu adresses à Marie, lettre dans laquelle tu me traites un peu durement. Je me suis décidé à ne pas aller à Arbois pendant ces vacances. Marie est de plus en plus fatiguée et a besoin de moi, et puis il nous est arrivé une nouvelle

aventure avec notre logement des bains St Guillaume. Tu sais que j'ai loué et donné des arrhes le jour de mon départ pour Paris. Quelques jours après le propriétaire venait nous donner congé pour Noël parce qu'il avait trouvé à louer à des conditions magnifiques trois de ses logements à une même personne. Nous voilà donc sans logement; car tu comprends qu'il est impossible que nous entrions dans cette maison pour la quitter deux mois après. Je cherche donc à nous caser et je ne trouve rien.

Ce concours de Paris s'est assez bien passé. Mais grâce à des séances qui duraient de 7 ou 8 h. du matin à 6 h. du soir avec 3/4 d'h. pour déjeuner j'avais mal à la tête tous les jours, plus des coliques, et tout cela m'empêchait de trouver le temps d'écrire soit à toi soit à Marie qui se désolait beaucoup quand je restais trois ou quatre jours sans lui dire que je me portais bien.

M. Biot va très bien et travaille beaucoup à achever son grand Traité d'Astronomie 1. Il m'a fait avant de partir plusieurs cadeaux scientifiques et m'a promis d'autres héritages de même genre.

J'ai trouvé Baptiste et Jeanne en très bonne santé, moins des rhumes qu'ils prennent la nuit en se découvrant.

M. Laurent est pris par la goutte et passe de très mauvaises nuits depuis quelques jours.

Adieu. Soigne bien ta santé. Parle-nous de ton mal d'œil s'il changeait de caractère ou s'iL empirait et embrasse bien Virginie et ses enfants pour nous tous.

L. PASTEUR.