1775-08-04, de Voltaire [François Marie Arouet] à Louis François Armand Du Plessis, duc de Richelieu.

Je viens de baigner dans ce moment les ailes de papillon philosophe dans de petits bains fort jolis.
Elle n'est point du tout papillon en amitié, et je puis dire sans aucune finesse, qu'on doit être très sûr qu'elle n'avait aucun tort quand elle ne reçut pas une certaine visite. Il y avait deux carosses dans sa cour depuis quelques heures. La personne qui l'accuse de Légèreté sur les apparences arriva chez elle un moment avant qu'on donnât l'ordre de laisser entrer. C'est cette méprise qui a occasioné un soupçon assez vraisemblable. Il arrive souvent qu'on cherche finesse où il n'y en a point du tout. Je réponds sur ma vie de l'innocence du papillon. Je réponds de la sincère amitié qu'elle a pour le héros. Elle prend le plus grand intérêt à tout ce qui la regarde.

On croit bien que nous avons traitté à fond l'affaire du héros. Elle pense que l'on fera naître autant d'incidents que l'on poura, et qu'on ne cherchera qu'à lasser la patience d'un homme qui doit être déjà très las de toutes les difficultés qu'on a fait naître dans une affaire si simple.

Le résultat de nos conversations est que les quatre Canons de Fontenoi, Genes, Closterseven et Portmahon, ont fait naître un peu d'envie, qu'on s'y est bien attendu, et que Made Pernelle avait raison quand elle disait que l'envie ne mourait jamais.

Papillon d'ailleurs, a un cœur charmant, incapable d'inconstance en amitié. Pour moi hibou que je suis, je dois rester et mourir dans mon trou. J'y forme des vœux pour le bonheur du héro; et je suis bien persuadé que ce bonheur ne sera point traversé par les lignes qu'une Provençale a écrites sur une vître.