[January 1773]
Oui, vous m'avez dit, mon cher et grand philosophe, ce que Luc vous mandait au sujet des révérends pères, et vous m'aviez instruit du bon usage que vous aviez fait de sa lettre; mais vous ne m'avez point parlé de celle de Catau.
C'est une chose infâme que je n'aie pas lu l' Eloge de Racine; je m'en suis plaint à vous. Cet ouvrage m'était absolument nécessaire; il est ridicule qu'on ne me l'ait point envoyé. Ce serait une bien bonne affaire si les Crétois pouvaient avoir une espèce de petit succès, malgré la rigueur des temps et la dureté des commis. Je vous réponds que cela ferait du bien à la bonne cause, vu les choses utiles dont cette polissonnerie est accompagnée. Dieu veuille avoir pitié de nos bonnes intentions! Je me recommande à lui; je ne cesserai de le servir en esprit et en vérité jusqu'au dernier moment de ma pauvre vie; mais je me recommande à vous davantage.
Je vous trouve bien hardi de m'écrire par la poste en droiture. Est ce que vous ne savez pas que toutes les lettres sont ouvertes, et qu'on connaît votre écriture comme votre style? Que n'envoyez vous vos lettres à Marin? Il les ferait passer sous un contre-seing que la poste respecte.
Mille compliments à m. de Condorcet et à vos autres amis. Si jamais on me prend pour monsieur Belleguier, il est de nécessité absolue que vous rejetiez bien loin cette horrible méprise, et surtout que vous tâchiez de ne point rire.