[c. 18 August 1772]
Le vieux malade de Ferney, a toujours oublié de mander à Monsieur Cramer son avanture avec Chirol.
Ce Chirol lui écrivit il y a environ trois semaines qu'on lui avait envoié un manuscrit de prétendues Lettres de Mr De Voltaire en vers et en prose à Madame de Chambonin, mère de Mr De Chambonin premier commis de la guerre, que probablement d'autres les publieraient s'il ne les publiait pas; que partant, il allait les imprimer.
Je ne lui fis point de réponse; je me proposai de vous en parler à vôtre retour des eaux. Je l'oubliai, parce que les malades d'environ quatre vingt ans, sont assez souvent courts de mémoire.
Aujourd'hui que je m'en souviens je puis vous protester que la plupart de ces misérables Lettres ne sont point de moi, que celles qui en sont, ne méritent pas, sans vanité, d'en être; qu'elles sont toutes défigurées par des choses absurdes; et que si Chirol s'avisait d'imprimer cette infâme rapsodie, je m'en plaindrais hautement.
Cet imbécile veut déshonorer ma mémoire pour de l'argent. Qu'il attende ma mort, il n'attendra pas longtems.
Je supose que vous avez quelque crédit sur ce pauvre diable impertinent; je vous demande en grâce de l'emploier pour l'empêcher de faire une si énorme sotise.
J'espère, mon cher Caro, que je pourai envoier des bouquets de la st Barthelémi à Paris, samedy prochain. Ils arriveront tout juste pour la fête.
Je salue madame Cramer et Monsieur Jean Louis.
V.