1771-01-31, de Voltaire [François Marie Arouet] à Gabriel Cramer.

Le malade fait ses très humbles remerciements à Monsieur et à Madame Cramer.
Il n'a pu leur écrire de tous ces jours cy; il était dans les plus grands tourments.

Il envoie à Monsieur Cramer les feuilles imprimées; il lui enverra demain du manuscrit. Il ne désespère point du tout que cet ouvrage n'entre à Paris dans quelque tems. Il conseille à Monsieur de joindre le 4e volume aux trois premiers, et de donner la suitte tome à tome. Il pense toujours que c'est la meilleure méthode, et il prie instamment Monsieur Cramer de la suivre.

On croit actuellement les deux tiers du parlement éxilés. On ne sait même s'il n'y a pas quelques membres en prison. Celui qui a deux cent mille soldats à ses ordres est toujours le maître, et ces bonnes gens n'ont pas songé assez à cette vérité. Du moins à Genêve on est sûr de coucher chez soi, ou dans le lit de sa voisine, rien n'est plus consolant.