15e avril 1767
Mon divin ange, battez des ailes plus que jamais, et ne laissez pas à l'infâme cabale un prétexte de dire qu'on n'ose plus rejouer les Scithes.
Je suis persuadé que si on annonce cette pièce avec des vers nouveaux répandus dans l'ouvrage, elle attirera un très grand concours. Les acteurs, rassurés par le succès des deux dernières représentations, rempliront mieux leurs personnages.
Mlle Durancy, plus pénétrée de son rôle, versera enfin des larmes, et en fera répandre.
On pourrait faire précéder la représentation d'un petit compliment dans lequel on dirait que l'éloignement des lieux n'a pas permis que les acteurs reçussent avant pâques les changements qu'on avait envoyés. On pourrait faire entendre qu'il est triste qu'un homme qui travaille depuis cinquante ans pour les plaisirs de Paris vive et meure dans un désert éloigné de Paris.
Voyez s'il serait convenable qu'au premier acte dans la scène des deux vieillards Sozame dît,
Je vous supplie de vouloir bien faire parvenir mes réponses à mlle Durancy et à mlle de St Val.
Dites bien quelque mardi à mr le duc de Choiseul combien je suis outré contre lui; il ne sait pas quel tort il me fait. Je suis vexé dans les lieux que j'ai défrichés, embellis, et enrichis; cela n'est pas juste; je suis entré dans toutes ses vues, et il ne daigne écouter aucune de mes prières.
Joignez y le fardeau insupportable de plus de cinquante lettres par semaine, auxquelles je suis obligé de répondre, la régie d'une terre, vingt ouvrages qui viennent à la traverse, et jugez si j'ai du temps de reste pour limer une tragédie. Plaignez moi et faites jouer les Scithes.
Mlle de st Val veut s'essayer dans Olimpie. Pourquoi non?