1767-02-02, de Voltaire [François Marie Arouet] à Étienne Noël Damilaville.

Mon cher ami, voilà donc Mlle Calas mariée à un homme d'une très grande considération dans son espèce.
C'est le fruit de vos soins. Ce sont des vengeurs qui vont naître. Puissions nous marier ainsi une fille de Sirven! mais la pauvre diablesse n'a pas l'air à la danse. J'ai actuellement bonne opinion de nôtre nouvelle affaire. Mr de Chardon est un adepte. Le conseil commence à être composé de sages, si une autre compagnie l'est de fanatiques.

L'affaire qui m'avait donné tant d'inquiétude est finie d'une manière plus heureuse que je n'aurais pu le prévoir. Il ne s'agit plus que d'obtenir des fermiers généraux la destitution d'un scélérat. Vous savez que les temps n'étaient pas favorables. Ce monstre d'Emery est venu enlever à Nancy un Libraire nommé Leclerc accusé par les jésuites. Qui croirait que les jésuites eussent encor le pouvoir de nuire, et que cette vipère coupée en morceaux pût mordre dans le seul trou qui lui reste?

Mon neveu, conseiller au grand Conseil s'est comporté dans toute cette affaire en digne philosophe. Il y a encor des hommes. Un des malheureux d'Abbeville est chez le Roi de Prusse.

Personne ne sçait de qui est le triumvirat. Ce n'est pas un ouvrage fait pour le théâtre français, mais les nottes sont faittes pour L'Europe.

Il y a de terribles fautes d'impression.

Je vous embrasse, et mon cœur vôle vers le vôtre. E: L:

Donner cours, je vous prie, à l'incluse, je ne sais point la demeure de madame Calas.