1766-06-14, de Voltaire [François Marie Arouet] à Philippe Charles François Joseph de Pavée, marquis de Villevieille.

Il est vrai, Monsieur, que je n'ai point reçu les six éxemplaires dont vous m'avez gratifié par la voie du 1er Secrétaire de l'intendance de Besançon; il se nomme Mr Ethis; j'ai écrit à cet Ethis; il faut qu'il soit dévot, il ne m'a point répondu.
Mais d'honnêtes gens qui ne sont point dévots m'ont apporté quatre éxemplaires; c'est assurément le plus beau présent que vous pussiez me faire; je suis pénétré de reconnaissance.

Je vois par l'excez de vos bontés que vous vous intéressez à l'auteur et à l'ouvrage; cet ouvrage me parait éxcellent. On n'a jamais ni cité avec plus de fidélité, ni raisonné avec plus de justesse. J'aime passionnément l'auteur, quel qu'il soit. Je voudrais être assez heureux pour vous tenir avec lui dans mon hermitage. Je sais bien que l'auteur n'est pas prêtre, mais je voudrais le prendre pour mon confesseur. Je n'ai pas longtemps à vivre. Je trouverais fort doux d'être assisté à la mort par un pareil chrétien. J'ai lu le livre deux fois, je le relirai une troisième, et je vous remercierai toute ma vie.

V.

Je rouvre ma Lettre, aussi proprement que je le puis, pour vous suplier, Monsieur, de vouloir bien dire s'il est vrai que le roi ait ordonné que l'on conservât les jésuites en Lorraine. Le livre que vous m'avez envoié m'apprend à douter de tout, mais je croirai ce que vous me direz.