1er juin 1764
Je reçois, mon cher frère, vôtre Lettre du 24e May, et la copie de vôtre beau sermon à frère Gabriel sur les devoirs de la société.
Je vous aime tous les jours d'avantage, et vous m'engagez à être plus que jamais Ecr: L'inf.
Gardez, je vous prie, les éxemplaires qui vous sont parvenus jusqu'à ce que nous puissions faire une Liste de ceux à qui nous en donnerons. Je suis toujours émerveillé de Mr D'Aquin qui demeure dans vôtre voisinage près de la rue St Paul. Il m'écrit qu'il me demande un Corneille, et tous mes ouvrages bons ou mauvais, il me parle d'un avant-coureur qu'il dit donner au public toutes les semaines; je lui donne tout, je souscris pour son avant coureur, et depuis ce temps je n'entends plus parler de lui.
Il me semble que les entousiastes de Pierre Corneille commencent un peu à se calmer, aussi bien que les entousiastes des Welches. Vous voiez qu'à la longue la vérité ne laisse pas d'avoir le dessus.
J'ai lu enfin le mandement de l'archevêque de Paris; je vous avoue qu'il m'a paru modéré et raisonable. Otez le nom de jésuite, il n'y aurait rien à lui répliquer; mais il n'y a pas moien d'avoir raison quand on soutient une société qui avait trouvé le secret, malgré sa politique, de déplaire à la nation depuis deux cent ans.
Est-il vrai qu'une jeune actrice a débuté avec succez dans les rôles ingénus? je m'intéresse beaucoup plus à une nouvelle actrice qu'à un nouveau prédicateur. J'aime le tripot, et je veux que les Welches aient du plaisir.
A t-on enfin jugé les Calas? celà me fait songer que nous devons un Corneille proprement relié à Mr Mariette. Je vous demande en grâce d'acquitter cette dette le plus promptement que faire se poura. Frère Thiriot pourait servir dans cette affaire. Le voilà à présent attaché à un archevêque, mais je me flatte qu'il n'oubliera pas les prophanes. Je soupire après l'Enciclopédie. Bonsoir, mon cher frère.
Ecr: L'inf: