21e xbre 1763
On m'envoie de Languedoc cette chanson, sur l'air de l'inconnu.
Cependant, on me mande aussi de Paris que l'Edition publique de la Lettre du quakre pourait faire grand tort à la bonne cause, que les doutes proposés à Jean George sur une douzaine de questions absurdes, rejaillissent également contre la doctrine, et contre l'endoctrineur, que le ridicule tombe autant sur les mistères que sur le prélat, qu'il suffit du moindre Gauchat, du moindre Chaumeix, du moindre polisson orthodoxe, pour faire naitre un réquisitoire de me Omer, que cet Esclandre ferait grand tort à la Tolérance, qu'il ne faut pas sacrifier un bel habit pour un ruban, que ces ouvrages sont faits pour les adeptes, et non pour la multitude.
C'est à mon très cher frère à peser mûrement ces raisons. Je me souviens d'un petit bossu qui vendait autre fois des Mêliers sous le manteau; mais il connaissait son monde et n'en vendait qu'aux amateurs.
Enfin, je me repose toujours sur le zèle éclairé de mon frère. Nous parviendrons infailliblement au point où nous voulions arriver, qui est d'ôter tout crédit aux fanatiques dans l'esprit des honnêtes gens. C'est bien assez, et c'est tout ce qu'on peut raisonnablement espérer. On réduira la superstition à faire le moindre mal qu'il soit possible. Nous imiterons enfin les Anglais qui sont depuis près de cent ans le peuple le plus sage de la terre comme le plus libre.
Je n'entends point parler de frère Thiriot. Je sçais l'avanture des Bigots. Voilà le seul bigot qu'on ait puni. Pardon de cette mauvaise plaisanterie. Bonsoir, mon cher frère.
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