1763-03-02, de Voltaire [François Marie Arouet] à Étienne Noël Damilaville.

En réponse à la lettre de mon cher frère du 23 février, je lui dirai: Mes frères, il ne faut pas calomnier les malheureux, surtout quand on n'a pas besoin de leur imputer des crimes.
Vous devez vous apercevoir que je n'ai pas ménagé les jésuites; mais je soulèverais la postérité en leur faveur si je les accusais d'un crime dont toute l'Europe et Damiens les ont justifiés. Je ne puis et ne dois dire que ce qui est dans le procès. J'ai rempli le devoir d'historien; et je ne serais qu'un vil écho des jansénistes, si je parlais autrement.

Comment pouvez vous dire que l'infâme n'a aucune part au crime de ce scélérat? Lisez donc sa réponse: C'est la religion qui m'a fait faire ce que j'ai fait. Voilà ce qu'il dit dans son interrogatoire. Je ne suis que son greffier.

Mon cher frère, je hais toute tyrannie, et je ne serai jamais ni jésuite, ni janséniste, ni parlementaire.

Il y a bien une autre bouffonnerie de ce Simon: vous savez sans doute l'aventure du garde des sceaux, du secrétaire Carpot et des lettres patentes. Cela est délicieux, et l'emporte sur tout le reste. Vive le roi, et Simon Lefranc!

Ecrasez l'infâme.