1763-07-12, de Voltaire [François Marie Arouet] à David Louis Constant de Rebecque, seigneur d'Hermenches.

J'ai écrit, Monsieur, je vous ai obéï avec un zèle auquel je crains que le succez ne réponde pas.
Si on me fait réponse, j'aurai L'honneur de vous en instruire. Vous sçavez combien il me serait doux de vous servir, et combien je serais flatté de vous avoir pour compatriote. Ma patrie a certainement besoin d'officiers comme vous, et en tout genre elle a besoin d'hommes. Je suis étonné que vous ayez lu le petit traitté sur la tolérance, et je suis honteux que vous ne l'ayez pas eu de ma main. Je crois qu'il faut encor attendre quelque temps. Les pièces du procès des Calas ne sont arrivées à Paris que la semaine passée; le procureur général de Toulouse a eu l'infamie de suprimer les requêtes que le malheureux Calas avait présentées pour faire entendre les témoins qui devaient déposer en sa faveur. Ce Pilate en sera pour son infamie. Nous allons pousser l'affaire avec la plus grande chaleur. J'en ai de mon côté qui me prennent une partie de mon temps; il est prétieux à mon âge, et je voudrais le passer avec vous. Conservez moi des bontés qui font le charme de ma vie.