à Montfalcon par Mâcon, Le 10 may 1760
…Comment gouvernés-vous M. de Voltaire?
Je me suis bien aperçu à mon dernier voyage dans vos cantons que vos liaisons étoient moins fréquentes avec lui qu'elles ne l'avoient d'abord été et je n'en fus nullement surpris, mais je pense que vous continués à vous voir toujours de temps en temps. Je voudrois bien que vous eussiez un jour occasion de vous aller promener à Tournay quand il y sera car j'ay une grande démangeaison de sçavoir ce qu'il y a fait ou ce qu'il y fait, en quel état sont actuellement les choses et comment tourne l'employ de mes Douze mille francs qu'il y doit mettre selon notre convention. Je n'ay rien pu apprendre làdessus d'assuré ni de satisfaisant, ce qui me donneroit grand désir de le sçavoir de vous ou de quelqu'un sur qui vous puissiez compter. Je veux croire qu'il n'en est pas de ceci comme de mes bois sur lesquels je suis instruit qu'il a passé de bien loin les bornes d'un usufruitier. Tout ceci soit dit entre nous deux sans aucune exception.
Combien vend-t-on dans votre ville le Dictionnaire de Prosper Marchand que je n'ay pas et que je voudrois avoir? Mille obéissances, je vous prie à Mde Jalabert. Toute ma famille vous fait des complimens sans nombre et ma fille n'oublie point l'aimable Fanni qui est sans doute à cette heure une grande demoiselle prête à marier.
Je suis de tout mon cœur, avec tout l'attachement et l'amitié possible, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur
Brosses