[? August 1757]
Si j'étais moins vieux, moins infirme je n'écrirais point à mon héros, je viendrais en Allemagne, je serais témoin de sa nouvelle gloire.
Mais Monseigneur je suis condamné par la nature à planter des choux, quand vous allez ceuillir des lauriers.
J'auray du moins des protecteurs auprès de vous. Messieurs de Chatauvieux, qui se chargent de ma lettre, ont l'honneur et le plaisir de servir sous vous. Ce sont de braves gentilshommes de nos cantons qui se sont mis à aimer la France de tout leur cœur, et qui vont l'aimer bien davantage en combattant sous vos ordres.
Ils ont levé il y a quelques années des compagnies à leurs dépends. Ils sont fils d'un des chefs les plus respectables de la république de Geneve. Comme je suis genevois six mois de l'année, et que me voilà dans mon semestre, je n'ay pu choisir de meilleurs garants de mon tendre et respectueux attachement pour vous. Je suis extrémement attaché à toutte leur famille et je ne me conduis pas maladroitement avec vous en prenant pour vous faire ma cour les plus sages et les plus braves officiers du monde qui ambitionnent autant que moy de vous plaire.
Recevez avec votre bonté ordinaire le profond et tendre respect du suisse
V.