à Colmar 29 aoust 1754
Messieurs les frères Cramer de Genéve qui sont à la fois gens de lêttres et libraires se sont offerts ainsi que beaucoup d'autres pour imprimer cinq volumes de l'histoire universelle avec touttes les oeuvres mélées.
Ils savent que c'est un objet d'environ douze volumes au moins, lequel demande beaucoup de tems et de soins.
Ils proposent de se joindre à Mr. Lambert; ils emploieront les mêmes formes, le même papier, les mêmes caractères.
Ils imprimeront une partie de ce receuil tandis que Mr. Lambert imprimera l'autre.
Par ce moïen tout l'ouvrage sera complet en peu de tems, et la beauté de l'édition empêchera qu'on ne le contrefasse.
Messieurs Cramer fourniront à Monsieur Lambert le nombre d'Exemplaires dont ils conviendront, et Monsieur Lambert fournira de son côté le nombre d'éxemplaires convenu de la partie imprimée par lui.
Il parait convenable qu'on tire une plus grande quantité de l'histoire universelle, qui sera un ouvrage tout neuf, que des oeuvres mélées dont on a fait déjà plusieurs éditions.
On pourait par éxemple tirer trois-mille éxemplaires de l'histoire universelle et quinze cent des oeuvres mélées, où bien quatre-mille de l'une, et deux-mille de l'autre.
Monsieur Lambert et Messieurs Cramer peuvent faire à frais communs cette entreprise qui ne laisse pas d'être considérable, et partager également toutte la dépense et tout le profit.
Monsieur Lambert peut s'assurer qu'il ne peut jamais avoir des associés plus attentifs et plus fidèles. Leur réputation de probité est aussi bien établie que celle de leur intelligence; ils sont au rang des plus éstimables citoïens de Genéve.
L'un des deux frères est venu éxprès à Colmar faire ces propositions; elles peuvent convenir à l'auteur qui n'a d'autre intérêt que de voir ses ouvrages imprimés avec célérité et éxactitude, et qui a envie de favoriser Monsieur Lambert en tout ce qu'il poura. Messieurs Cramer sont prêts à entreprendre le tout eux seuls. On croit faire plaisir à Monsieur Lambert en lui proposant cette association.
On lui demande une prompte réponse.
Il est prié d'envoïer non pas la première page, mais la première feuille de la Henriade.
Il est prié aussi de se conformer pour le caractère de la prose à celui qu'emploieront Messieurs Cramer en cas qu'ils conviennent ensemble.
Si ce parti lui convient, il faut qu'il envoïe incessamment ses propositions.
On croit que rien ne saurait être plus avantageux pour lui, attendu les grands frais que l'entreprise éxige.
On ignore encor si l'histoire universelle contiendra cinq ou six tomes. En tout cas on imprimera toujours tout ce qui est fait jusqu'à la mort de Henri 4.
Il est d'autant plus important que Mrs Crammer impriment cette histoire qu'on rectifiera très exactement à Geneve touttes les fautes de copiste, et touttes les erreurs de datte qui auront pu échaper, ce qui est un grand soulagement.
On fait mille compliments à M. Lambert.