1752-01-07, de Voltaire [François Marie Arouet] à Cardinal Girolamo Quirini.
Eh quoy? Vous voulez que je chante
Ce temple orné par vos bienfaits
Dont aujourduy Berlin se vante?
Je vous admire, et je me tais.
Comment sur les bords de la Sprée
Dans cette infidèle contrée
Où de Rome on brave les loix,
Pourai-je élever une voix
A des cardinaux consacrée?
Eloigné des murs de Sion
Je gémis en bon catolique.
Hélas mon prince est hérétique
Et n'a point de dévotion.
Je vois avec componction
Que dans l'infernale séquelle
Il sera près de Ciceron
Ou d'Aristide, ou de Platon
Ou vis à vis de Marc Aurele.
On sait que ces esprits fameux
Sont punis dans la nuit profonde.
Il faut qu'il soit damné comme eux
Puis qu'il vit comme eux dans le monde.
Mais surtout que je suis fâché
De le voir toujours entiché
De L'énorme et cruel péché,
Que l'on nomme la tolérance.
Pour moy je frémis quand je pense
Que le musulman, le payen,
Le quacre, le lutherien,
L'enfant de Geneve ou de Rome
Chez luy tout est reçu si bien
Pourvu que l'on soit honnête homme.
Pour comble de méchanceté
Il a sçu rendre ridicule
Cette sainte inhumanité,
Cette haine dont, sans scrupule,
S'armait le dévot entêté
Et dont se raillait l'incrédule.
Que ferai-je Grand cardinal,
Moy chambellan très inutile
D'un prince endurci dans le mal,
Et proscrit dans notre évangile?
Vous dont le front prédestiné
A nos yeux doublement éclate,
Vous dont le chapeau d'écarlate
Des lauriers du Pinde est orné,
Qui marchant sur les pas d'Horace
Et sur ceux de Saint Augustin
Suivez le raboteux chemin
Du paradis et du parnasse,
Convertissez ce rare esprit.
C'est à vous d'instruire et de plaire,
Et la grâce de Jesus Christ
Chez vous brille en plus d'un écrit
Avec les trois grâces d'Homere.

La morte del’ conte di Rotembourg, L'uno dé direttori di questa chieza tanto favorita da V. E., a cagionato qui un gran ramarico, io sarei molto sorpreso se egli non havesse lasciato nel’ suo testamento una considerabil somma di danari per cotribuire alla fabrica del vostro edifizio. I continui assalti della malatia che mi distrugge, mi fanno augurare andero dove é gito il povero conte di Rotembourg e dove non s'edificano case ne per iddio ne per gli uomini. L'ultime mie voglie saranno in favore della chiesa di Berlino, ma daro poco giache, sono un uomo da poco, e bisogna pigliar cura di suoi parenti ed amici prima di pensare alle pietre d'un monumento. Tocca a un vescovo, a un gran cardinale, a un celebratissimo benefattore come voi siete, di segnalare la sua beneficenza dovunque va la sua gloria.

Rimango con ogni riverenza del suo imparregiabile merito si come di sua Eminenza

l'ummo e devotmo servre

Voltaire