Monsieur le baron Le Chambrier,
Le sieur de Voltaire m'ayant témoigné autant de zèle et d'empressement de s'attacher à ma personne, que j'aurais moi même de plaisir de pouvoir l'y fixer, je me suis déterminé bien volontiers à le placer au nombre de mes chambellans et à l'honorer de mon ordre du mérite, s'il peut obtenir la permission de s'établir ici.
Mais comme il est employé au service de France et même en charge auprès du roi, mon intention est que vous voyiez les ministres à ce sujet au reçu de cette lettre, et que vous assuriez bien que, malgré la satisfaction extrême que j'aurais de posséder à ma cour un homme aussi célèbre, j'y renoncerai cependant, si son déplacemt peut déplaire en quelque chose à s. m. t. c., que si au contraire elle veut bien m'en faire le sacrifice, j'en sentirai tout le prix et regarderai cette complaisance comme une marque particulière de son attention et une preuve bien sensible de son amitié. Je vous recommande expressément de faire connaître mes sentiments à cet égard d'une manière capable d'en bien persuader et de me rendre compte le plus tôt possible de l'effet de la demande du sr de Voltaire et de ce qui aura été décidé en conséquence. Sur ce je prie Dieu qu'il vous ait, monsieur le baron Le Chambrier, en sa sainte et digne garde.
Federic
fait à Potsdam le 8 août 1750
Il faut faire ceci sans me commettre. Si vous y voyez la moindre répugnance, il faut déclarer à ces messieurs que je me désiste de tout.