1743-06-03, de Gabrielle Émilie Le Tonnelier de Breteuil, marquise Du Châtelet-Lomont à Johann Bernoulli.

Ie suis très flattée monsieur de la compagnie dans laquelle on veut me mettre, et en tout que l'on ait pensé à moi pour le receüil dont vous me parlés. Ie fais faire vne copie de mon portrait que Natier qui est àprésent le meilleur p͞r le portrait, vient de finir, et aussitôt que la copie sera faitte ie v͞s l'adresserai par le carosse de Strasbourg. Ie ne sais lequel est le plus flateur p͞r moi, ou l'usage qu'on veut faire de mon portrait, ou la bonté que v͞s aués de vouloir le garder. Ie trouue encore en tout ceci vn grand auantage, c'est d'auoir reçu de vos nouuelles. V͞s devés être bien sûr qu'on n'oublie point quelqu'un come v͞s quand on l'a vne fois conu, et que les marques de votre amitié me feront toujours grand plaisir.

M. de Voltaire me charge de v͞s faire mille complimens. Il a Eté vn peu fâché que v͞s ne v͞s soiés pas souuenu de lui dans votre lettre d'autant plus qu'il a fait l'anée passée 4 vers p͞r le portrait de m. votre père dont il espère que v͞s, et lui, aués Eté contens. Il veut se charger des mémoires sur ma vie que v͞s me demandés, et qui Etoient bien ce qui m'embarasoit le plus dans cette affaire, mais puisqu'il veut bien me faire cet honeur là, v͞s sentés combien ie désire d'en profiter.

Ie v͞s suplie de faire bien des complimens p͞r moi à mr votre père et à m. votre frère Daniel, et de me croire auec une considération infinie Monsieur votre très humble et très obéisante seruante

Breteüil du Chastellet

v͞s devés auoir reçu vn Exemplaire de la généalogie de notre maison que ie v͞s ai enuoié par le carose de Strasbourg. Ie ne sais si v͞s saués que ie viens de marier ma fille à vn homme de la maison Caraffa.