Au camp de Kuttenberg, ce 18 de juin 1742
J'espère qu'après avoir fait ma paix avec les ennemis, je pourrai à mon tour la faire avec vous. Je demande le Siècle de Louis XIV pour la sceller de votre part, etje vous envoie la relation que j'ai faite moi même de la dernière bataille, comme vous me la demandez.
Je ne puis vous entretenir encore, jusqu'à présent, que de marches, de retraites honteuses, de poursuites, de coïonneries, et de toutes sortes d'événements qui, pour rouler sur des matières fort graves, n'en sont pas moins ridicules.
La santé de Rottembourg commence à se rétablir; il est entièrement hors de danger. Ne me croyez point cruel, mais croyez moi assez raisonnable pour ne choisir un mal que dans des occasions où l'on veut éviter un pire. Tout homme qui se fait arracher une dent, puisqu'elle est cariée, livrera bataille lorsqu'il veut terminer une guerre. Répandre du sang dans une pareille conjoncture, c'est véritablement le ménager; c'est proprement une saignée que l'on fait à son ennemi en délire, et qui lui rend son bon sens.
Adieu, cher Voltaire; croyez toujours, et jusqu'à ce que je vous dise le contraire, que je vous estimerai et aimerai toute ma vie.
Federic