1738-10-24, de Voltaire [François Marie Arouet] à Nicolas Claude Thieriot.

Je ne vous écris souvent que trois lignes père Mersenne parce que j'en grifone trois ou quatre cent, et en rature 500 pour mériter un jour votre suffrage.
La correction de la Henriade, entroit dans mes travaux. Lorsque vous m'aprenez le dessein des libraires, il faut m'y conformer. Il faut rendre cet ouvrage digne de mes amis et de la postérité. Mais Praut se disposoit à en faire une édition, il me faisoit graver. Il faudroit l'engager à entrer dans le projet des Gandoin. Je n'ay point reçu un gros paquet du prince, dont vous parliez, mais un très petit. Qu'est devenu le gros? Dites donc à Praut de ne plus envoyer, ou plutôt de ne me plus faire attendre, inutilement, les livres de Phisique, et que vous avez la bonté de vous en charger.

Le s'Gravesende, 2 volumes in 4º, est ce que je demande avec le plus d'insistance. Je ne peux vivre sans ce Sgravesende, et sans Desaguliers. Voyla l'essentiel.

Je vous enverrai ma réponse à mr le Franc. Vous êtes le lien des cœurs.

Je vous enverray une lettre pour Pline Dubos. Dites luy que ma reconnaissance est égale à mon estime.

Vous me faites trop d'honneur à moy et à mon effigie. Soufrez que l'abbé Moussinot paye le peintre, et que votre amitié ne vous mette pas en frais.

J'ay tant de choses à vous dire que je ne vous dis rien. Vale, vive et ama.

Le premier ordinaire vous aurez des choses immenses.

V.