Monsieur, vous savez sans doute que le caractère dominant de notre nation n'est pas cette aimable vivacité des Français; on nous attribue en revanche le bon sens, la candeur et la véracité de nos discours, ce qui suffit pour vous faire sentir qu'un rimeur des fonds de la Germanie n'est pas propre à produire des impromptus.
La pièce que je vous envoie n'a pas non plus ce mérite.
J'ai été longtemps en suspens si je devais vous envoyer mes vers ou non, à vous, l'Apollon du Parnasse français, à vous, devant qui les Racine, les Corneille, ces grands hommes, ne sauraient se soutenir. Deux motifs m'y ont pourtant déterminé: celui qui eût sûrement dissuadé tout autre, est, monsieur, que vous êtes vous même poète, et que par conséquent vous devez connaître ce désir insurmontable, cette fureur que l'on a de produire ses premiers ouvrages; l'autre, et qui m'a le plus fortifié dans mon dessein, est le plaisir que j'ai de vous faire connaître mes sentiments à la faveur des vers, ce qui n'aurait pas eu la même grâce en prose.
Le plus grand mérite de ma pièce est, sans contredit, de ce qu'elle est ornée de votre nom; mon amour propre ne m'aveugle pas jusques au point de croire cette épître exempte de défauts. Je ne la trouve pas digne même de vous être adressée. J'ai lu, monsieur, vos ouvrages et ceux des plus célèbres auteurs et je vous assure que je connais la différence infinie qu'il y a entre leurs vers et les miens.
Je vous abandonne ma pièce: critiquez, condamnez, désapprouvez la, à condition de faire grâce aux deux vers qui la finissent. Je m'intéresse vivement pour eux: la pensée en est si véritable, si évidente, si manifeste, que je me vois en état d'en défendre la cause contre les critiques le plus rigides, malgré la haine, l'envie et en dépit de la calomnie. Je suis, monsieur, avec une très parfaite estime votre très affectionné ami
Federic P. R.
Epittre
A Monfieur De Voltere.En quoi confiste la fausse et
La Veritable grandeur.Voltere ce n'est point le Ranc et la puifsanceni les Vains pregugéz d'une Illustre naisencequi peuvent proqurér la sollide grandeurdu Vulgaire ignorent telle est souvent L'ereur;mais un homme eclairé tient en main la balancelui soeul fait distinguér le vrai de L'aparanceil n'est point ebloui par un trompeux eclatSous des tittres pompeux il decouvre le fatet d'Illustres aÿeux ne compte point la fsuiteSi Vous n'herité d'eux leurs vertu leur merite.Il est d'autre moÿeins de se randre fameuxqui dependent de nous et sont plus glorieuxchaqun à des talents dont il doit faire usagecelon que le destein en regla le partageL'esprit de L'home est tel qu'un Diamant precieuxQui fens estre taillé ne brille point aux jeuxqui conque a trouvé l'art d'anoblir fon geniemerite nostre homage en depit de l'envieRome nous Vante encor les fons de CorelliLe fransais preveneux fredonne avec LulliL'Eneide Imorelle en beauté ci fertilletrens met jusqu’à nos jours l'heureux nom de VirgilleCarache le Tifien Rubens bonnarotinous sont aussi cogneux que l'est AllgarotiLui dont L'art du Compas et le Calcul exedeLe Savoir tent Vanté du Celebre ArchimedeOn respecte en tout lieux le profond CasfiniLa fasade du Louvre exalte Berniniaux Manes de Neuton tout Londre encore enfenceHenri le grand, Colbert, sont cheris de la Franceet Vostre Non fameux par des fsavents exploitsDoit estre mis aux Rang des Heros et des Roys
à Remusberg ce 13 de Nov. 1736