[p. 1] Paris, 12 août 1845
Mon cher ami 1,
Je suis passé il y a quelques jours au ministère pour avoir le plaisir de vous voir, tout en vous rendant réponse relativement à l’achèvement de mes travaux2. Comme on m’a dit que vous étiez encore absent, je prends le parti de vous écrire. Je suis tout à fait en mesure pour le mois prochain, ma besogne étant presque terminée, ainsi vous pouvez demander l’ordonnancement en sûreté de conscience.
J’aurais à vous reparler d’une demande que vous avez déjà accueillie : celle d’indemnités pour les dépenses où m’ont entraînées forcément, d’abord la nature des travaux et des localités tant pour la Chambre des pairs que pour celle des députés, puis pour le dommage que j’ai éprouvé en recommençant entièrement un des deux hémicycles qui étaient presque terminés à cause des fentes qui se sont manifestées dans la voûte. L’architecte 3 lui-même est déjà convenu qu’il était indispensable de [p. 2] demander aux travaux publics de faire construire un toit en dehors qui puisse protéger cette coupole qui n’a pas un demi-pied d’épaisseur et est exposée sans protection à l’action incessante du soleil de midi et aux intempéries de l’hiver. Ce serait le seul moyen d’empêcher un peu la dilatation extraordinaire des fentes à l’occasion des grandes chaleurs, qui entraînerait dans très peu de temps l’entière destruction de la peinture. Vous serait-il possible de faire mention et de prendre note de ma demande ?
Il me restera, à la fin de ce travail, une nouvelle obligation à remplir en vous remerciant de nouveau mille fois, et du fond du cœur, de toute votre bonté et votre obligeance pour moi dans cette occasion comme dans tant d’autres.
Voulez-vous, cher Monsieur et ami, me rappeler au souvenir de Madame Cavé et recevoir les nouvelles assurances de mon sincère dévouement ?
Eug. Delacroix