1773-11-27, de François Louis Jeanmaire à Voltaire [François Marie Arouet].

M.,

J’ai la Lettre que vous m’avés fait l’honeur de m’écrire le 22 de ce mois, et je me hâte d’y répondre crainte de passer pour mort dans votre esprit.
Si je suis resté dans le silence depuis mon voyage de Geneve, c’est que la régence parloit. Elle Vous a demandé terme pour le remboursement de Votre Capital et vous le lui avés accordé. Elle ne manquera de Vous faire parvenir au plutôt l’arrangement que Vous demandés. On a été obligé d’avoir recours à cet expédient faut d’avoir pû compléter l’emprunt projetté et par l’obligation où l’on est de payer des dettes contractées dans des Circonstances indispensables. Si Vous aviés Voulû Monsieur ou plûtôt si Vous Vouliés encore nous procurer cet excédent qui est de 70/m.lt Vous ne pouriés faire mieux. Je prévois que Vous dirés, que Vous formés des Etablissemens et que Vous bâtissés des Maisons qu’ainsi Vous n’avés point d’argent. Mais tous ces monumens n’ajouteront rien à Votre gloire, ils périront un jour et feront peut être des malheureux; Aulieu qu’en rendant service à un grand Prince, Vous l’obligés sans faire tort à Votre Maison. Aureste Mr je Vous fais cette proposition sans aucun ordre, mais je suis très persuadé que si Vous y donés les mains on l’acceptera avec plaisir, et je Vous assure que ce seroit le vrai moyen de faire un arrangement solide et invariable pour le remboursement exacte et entier de votre capital.

Le Sr Mainer Vous fera parvenir incessament le dernier quartier de votre rente, il se plaint que Vous ne lui donnés point d’acquit, et qu’à ce défaut le Receveur Général refuse de lui tenir compte des somes qu’il vous fait toucher.

Je suis &c.