1761-12-28, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jeanne Grâce Bosc Du Bouchet, comtesse d'Argental.

Est il donc vrai, mes anges, que l'Espagne a enfin exaucé mes vœux? puis je en faire mon compliment?
Oh! quelle bonne nouvelle!

Me permettez vous de vous envoyer ce petit mémoireà l'académie, que je vous supplie de faire passer à mr le secrétaire?

Mr le comte de Choiseul a eu tant de bonté que j'en abuse. Il s'agit de bien autre chose que de mr d'Exedeuil. Il est question de savoir s'il est vrai que la cour de France ait amusé pendant deux ans la cour russe d'un mariage du roi avec mon impératrice Elisabeth, alors pauvre princesse, et qui vient d'envoyer huit mille livres pour l'édition de mademoiselle Corneille. Il est très certain que mr Campédeon en parla très souvent à mon père. Si cette recherche vous amuse, je vous conjure de vous informer de la vérité.

Cassandre ne va pas mal, il se débarbouille. Mille tendres respects, anges consolateurs!

N. B. qu'il y a deux ans que je dis: l'Espagne tombera sur le Portugal.

A propos que dire du tripot, qui fait en tout temps et en tout lieu mes plus chères délices? Hier soir j'étais bien intéressant, je ressemblais au bon et attendrissant Bélisaire, j'avais un casque et un manteau de sénateur romain: j'ai attendri jusques aux larmes. Venez donc, vous jugerez mieux que personne, et votre suffrage me sera plus cher que celui du monde entier.

V.