[2 dbre 1757]
Ne pouriez vous point mon cher ange faire tenir à M. l. de B. la lettre que je vous écris?
Vous me feriez grand plaisir. Serait il possible qu'on eût imaginé que je m'intéresse au R. de P.? J'en suis pardieu bien loin. Il n'y a mortel au monde qui fasse plus de vœux pour le succez des mesures présentes. J'ay goûté la vangeance de consoler un roy qui m'avait maltraitté. Il n'a tenu qu'à mr de Soubise que je le consolasse d'avantage. Si on s'était emparé des hauteurs que le diligent prussien garnit d'artillerie et de cavalerie tout était fini. Le général Marshal entrait de son côté dans le Brandebourg. Nous voylà renvoiez bien loin avec une honte qui n'est pas courte. Figurez vous que le soir de la bataille, le R. de P. soupant dans un châtau voisin chez une bonne dame prit tous ses vieux draps pour faire des bandages à nos blessez. Quel plaisir pour luy! que de générositez adroites, qui ne coûtent rien, et qui rendent baucoup! et que de bons mots, et que de plaisanteries! Cependant je le tiens perdu si on veut le perdre et se bien conduire, mais qu'en reviendra t'il à la France? de rendre l'Autriche plus puissante que du temps de Ferdinand second et de se ruiner pour l'aggrandir? Le cas est embarassant.
Point de Fanime quand on nous bat et qu'on se moque de nous. Attendons des hivers plus agréables. Si je savais le nom de votre protégé j'en écrirais à Lemoine, le farceur de Dijon. Bonsoir mon divin ange.
V.
Les Crammers feront tout ce que Bret veut, mais un des Crammers est en Portugal et l'autre est un gr flandrin qui fait l'amour. J'écrirai à mr Doutremont et je vous remercie de la correspondance. Mais je doute qu'on puisse avoir rien de mieux qu'un tonnau d'archives qu'on m'envoye.
N. B. que ce que j'ay confié à M. l. de B. prouve que l. R. de P. était perdu si on s'était bien conduit. Ce n'est pas là chercher à déplaire à Marie Térèse et ce que j'ay mandé méritait un mot de réponse vague, un mot d'amitié.