[?16 November 1757]
Je comptois, mon tendre ami, passer ma matinée avec vous, mais je suis privée aujourd'hui de cette unique et douce consolation.
Monsieur de Montbrillant ne fait que partir et le courier en va faire autant. Je n'écris qu'à ma mère et à vous ce mot pour vous dire que je me porte bien et que mon sauveur, qui est adorable, me rabâche et me gronde presque autant que vous. Il me mène aujourd'hui chez Voltaire pour la première fois. Je n'ai pas voulu me presser de me rendre aux instances continuelles que lui et sa nièce m'ont faites. Il m'a écrit presque tous les jours les plus jolis billets du monde, j'ai répondu verbalement; je me suis contentée de lui envoyer mon mari, mon fils et Monsieur Balbi, et je me suis tenue tranquille. J'y vais enfin, mais j'ai hâte d'être de retour pour causer un peu librement avec vous.
Bon! l'on m'annonce que le courier est parti, et voilà ma lettre retardée de quatre jours! Si vous allez être inquiet, je serai désolée. On m'attend pour partir. Bon jour donc, à ce soir.
Le soir.
Il est tard, j'arrive de chez Voltaire, malgré cela il faut vous dire un petit mot, il n'y a pas moyen de se coucher sans cela. J'ai fort bien soutenu cette journée, je suis fort contente du grand homme, il m'a accablée de politesses; ce n'est pas sa faute si nous sommes revenus ce soir en ville, il vouloit nous garder . . . .