à Bruxelles ce 3 8bre 1742
Vous me tirés de deux grandes inquiétudes, mon cher ami.
La première est celle de Mahomet, ie crois que l'espérance de la voir rejouer n͞s contiendra et v͞s aués très bien fait d'en parler dans votre lettre, quoique ie croie que v͞s ne l'espérés pas plus que moi. L'autre peine dont v͞s m'aués tirée c'est au sujet de l'étofe que m͞e de Bois désire, ie sauais bien que quelqu'un m'en auoit demandé, mais il m'étoit imposible de me souuenir qui c'étoit et cela me tourmentoit beaucoup. Ie v͞s prie d'asurer m͞e Dargental et elle qu'elles en auront chacune 13 aulnes de France que ie leur aporterai, quand, c'est ce que i'ygnore. Mon auocat prétend que si ie ne fais pas juger l'incident du testament auant mon départ il faudra absolument que ie reuiene p͞r le faire juger. Il faudroit donc paser ma vie à aller de Paris à Bruxelles, ce qui seroit triste et cher. Si ie puis donc espérer de le voir juger auant le 15 de nouembre ie resterai et retarderai le mariage de ma fille, mais si ie vois que cela soit impossible, ie partirai d'abord. Voilà mon cher ami ma triste situation, elle est encore agrauée par l'inquiétude où ie suis de nos maturins. On dit à tout moment ici qu'il y a eü des afaires et cela ne peut pas tarder, mais ie saurai les détails bien tard, car ie ne pourai les aprendre que de France. Tout se prépare ici à la guere, mais cela ne fera rien à mon procès, car ce ne sera pas la reine qui déclarera la guere à la France mais l'Angletere, ainsi la reine fera la guere sous le nom de l'Angletere come n͞s sous le nom de l'empereur. Les hessois et les hanouriens ariuent àforce, on a enuoié les paseports p͞r les Equipages du roi d'Angletere, et on ne doute point du siège de Dunkerke. Ie crois que v͞s voiés tout cela auec autant de chagrin que moi, la société et les arts n'ont qu'à perdre par la guere, et ie ne crois pas que n͞s gagnions beaucoup à celle ci, sy ce n'est de la gloire pourtant, car le siège de Pragues n͞s fait grand honeur.
Adieu mon cher ami, n͞s disons des choses bien tendres à m͞e Dargental, et n͞s v͞s embrasons mille fois.
Il n'i a plus d'étofe dans la boutique où i'ay pris la miene, i'en ai trouué dans une autre, voilà un échantillon, elle me parait de même. Cela reuiendra à 10lt et quelques sous de France l'aune de France, mais cela est plus large que le ras de St Maur ordinaire. Ie comte que cela a à peu prés la longueur du tafetas d'Angletere. Si ces dames le veulent il faut que ie le sache promtem͞t crainte qu'on ne le vende.