à Paris ce samedi au soir [21 mars 1733]

Je n'y pu encor vous écrire mon cher ami non faute d'envie mais faute de Temps.
Ce ne sont pas cependant ni Les grandes occupations ny Les grands plaisirs qui me Rendent si affairé mais C'est qu'on ne peut faire icy qu'une chose par jour et que Comme vous savés mon jour n'est que La moitié de celuy des autres.

Je n'ay point de nouvelles intéressantes à vous mander. J'ay écrit à m^de Formont un petit détail de spectacles. Je sors d'Isis où La Le Maure a été miraculeuse. Notre ami V. s'est étrangement Barbouillé dans Le public par son temple du goust. Les gens Les plus équitables Le trouvent mauvais pour un ouvrage en forme et ils ont Raison. Cela n'auroit été bien que Comme un Badinage et pièce fugitive qui Court sans qu'on La donne. D'ailleurs Le ton décisif Blesse et Beaucoup de décisions indépendemment de L'air Blessent encor. Il n'y a Rien à Luy en dire parce qu'il n'y a pas de Reméde. Il est plus mal voulu qu'il n'a jamais été. Il me pria de passer chés Luy il y a 2 jours. [l me dit Le plan de sa nouvelle pièce dont il y a 4 actes de faits. Il n'eut pas La force de m'en Rien lire parcequ'il souffroit de ses Coliques ordinaires. Si ses Lettres angloises venoint dans ces circonstances elles seroint sifflées.

A La Reprise des spectacles on jouera L'opéra du ch^r de Brassac. J'iray à La Répétition qui doit s'en faire Bientôt. Il s'apele L'empire de L'amour.

Je vous prie De faire mille complimens pour moy à m^r et m^de De Frequienes. Je souhaiterois fort qu'ils fussent icy, et je suis Bien fâché que ma partie avec eux ait manqué. Voilà Les spectacles finis et je hais ce temps à Paris. Il y aura pourtant des concerts spirituels magnifiques. Mille complimens à nos amis du Bourgtheroude et C^r de Cretot. M^r de Frequiene aura Beau jeu car m^de de Mortemart vouloit se séparer ces jours cy d'avec son mari, mais on dit que cela est Replâtré. Elle a une antipathie affreuse pour m^r de Mortemart mais tout cela ne fera pas B. notre amis. Adieu de tout mon cœur.