[c. 20 April 1726]
Monseigneur,
Je remontre très humblement que j'ai été assassiné par le brave chevalier de Rohan assisté de six coupe jarets derrière les quels il étoit hardiment posté.
J'ai toujours cherché depuis ce temps là, à réparer non mon honneur, mais le sien, ce qui étoit trop difficile.
Si je suis venu dans Versailles, il est très faux que j'aïe été demander ny fait demander le Chevalier de Rohan Chabot, chez mr le cardinal de Rohan. Il m'est très aisé de prouver le contraire, et je consens de rester toutte ma vie à la bastille, si j'impose.
Je demande la permission de manger avec monsieur le gouverneur de la bastille et de voir du monde. Je demande avec encor plus d'instance la permission d'aller incessament en Angleterre; si on doute de mon départ, on peut m'envoyer avec un exemt jusqu'à Calais.
Ces deux grâces qui sont très grandes pour moy dans l'état horrible où je suis, ne sont rien en comparaison d'une plus grande que je vous demande, c'est de me conserver votre protection et votre bienveillance que j'ai toujours méritée par le dévouement respectueux et par l'estime sincère avec la quelle je suis
Monseigneur
Votre très humble et très obéissant serviteur,
Voltaire