25 mai 1768
Il me semble, mon cher ami, qu'on a peu d'attention à la poste pour vos paquets.
Non seulement je vous avais envoyé 40 écus pour votre mr de Menard, mais je vous avais envoyé encore 40 écus pour mde Denys avec une lettre. Rien de tout cela n'est arrivé à bon port. Vous voyez qu'il y a des gens qui courent après les sommes les plus modiques. Je ne hasarde point de vous envoyer la guerre que vous demandez, on l'imprime à Paris.
Je sais, mon cher ami, que les gens qui parlent de tout sans rien savoir (gens qui sont en fort grand nombre) ont fait de beaux commentaires sur le voyage de ma nièce, mais puisque vous avez eu l'occasion de lui parler de moi vous savez sans doute qu'il n'y a pas un mot de vrai dans tout ce qu'on a dit. Elle est allée à Paris pour raccommoder nos affaires qu'une absence de 15 ans avait beaucoup délabrées; malgré ce délabrement je lui donne vingt mille francs de pension et environ dix tant au reste de ma famille qu'à mde Du Puyts. Un vieillard comme moi a peu de besoins, il faut qu'il ne vive que pour la retraite et pour la sobriété; je suis honteux même du beau château que j'occupe, j'espère bientôt le vendre pour mde Denys et me retirer dans un ermitage plus convenable à mon âge et à mon humeur. Je vous confie ma situation, je compte sur votre amitié et sur celle de mde de Chenevières.