1768-05-06, de George Keate à Voltaire [François Marie Arouet].

Je ne sçaurai vous dire mon cher monsieur combien J'ai été mortifié en recevant vos deux Lettres, par lesquelles J'etois informé que mon poëme sur Ferney ne vous étoit point parvenu.
Je vous expédiai un Exemplaire le 29 me de Janvier qu'étoit quelques jours avant qu'il étoit donné au public, et au même tems Je vous addressai une longue Lettre. — Il est bien triste pour moi que la poste m'a été si infidèle, et que vous receverez si tard un Ouvrage qui étoit l'objet de ma reconnoissance et de mon Amitié pour vous. J'espère qu'avant que cette Lettre vous parviendra vous auriez reçu un autre Exemplaire par les Mains d'un particulier, mais de peur que celui ci manqueroit l'Ecquier de Monsr le Prince de Monaco qui part demain pour Paris m'a promis de mettre à la poste de Paris un troisième Exemplaire dont j'ai coupé la marge pour le rendre moins pesant.

Les Livres de Bourn qui vous souhaitez de voir J'ai acheté ce matin, ils sont en 4 volumes en octavo et Je vous les expédiai le plus vit que Je puisse. La seconde Edition vient de paroitre il y a un mois.

Tout ce que je puisse dire à l'égard de Ferney et de répéter ce que Je disois dans ma Lettre de 29me de Janvier, que J'espère qu'il obtiendroit votre approbation et Je puisse vous assurer que le sujet de ce poème m'intéressoit trop pour ne pas m'engager de le traiter avec tout l'art dont j'étois capable. Recevez le donc mon cher monsieur comme un Homage que mon Coeur paye à votre Amitié!

Pardonne Monsr si se renouvelle dans ce poëme notre ancienne Contestation sur Shakespear, c'est une Cause dans laquelle un Anglois ne peut jamais céder.

Le Recueil de vos Ouvrages que vous voulez bien avoir la bonté de m'envoyer me parviendra très sûrement si vous voulez prendre la peine de le faire addresser à madame la Veuve Justin et fils à Amsterdam pour faire passer à Monsr Duvel Joaillier du Roi à Londres. Je regarde ce présent de votre part comme une marque de votre amitié.

Excuse the haste in which I write, but I would not omit the first post to express my Concern far all that has happened. I beg you will write to me as soon as you receive the poem, and be assured I shall never forget my kind Friend at Ferney whom I shall be happy once more to embrace. I am Dear Sir

Yrs most affectionately,

Keate