1750-02-28, de Voltaire [François Marie Arouet] à Marie Louise Denis.

Mr de Cheneviere cara mia musa, vous rend bon compte des dispenses d'âge de votre frère; je vous en rendray un fort bon d'Alzire; vous auriez été étonnée.
Je l'ay été, et j'ay pleuré. Les larmes ne se commandent point. Un courtisan peut battre des mains, s'extasier, exagérer. Mais il n'y a que le cœur qui pleure. Je vous aurois bien voulu lâ. Je ne vous reveray que mercredy ma chère enfant. Je verray mardy L'opéra. Je m'en donne probablement pour la dernière fois de ma vie. Je vous répons que je ne feray jamais de si long voiage à la cour; je me crois en pays perdu. Ma vraye demeure est où vous êtes. Tout m'est étranger. Vous êtes ma famille entière, ma cour, mon Versailles, mon Parnasse, et la seule ressource de mon cœur. Je croi que vous travaillez fort et ferme et moy aussi. Adio, vi amero sempre.

V.