aux Délices 7e Mars 1764 Vous dites des bons mots, Madame, et moi je fais de mauvais contes; mais vôtre imagination doit avoir de l'indulgence pour la mienne, attendu que les grands doivent protéger les petits.
La mienne est désespérée.
Chacun a sa chimère; voilà la mienne. […] Son frère fait la consolation de la mienne.
Je vous ay demandé des couplets sur l'air des noels parceque tout le monde peut les chanter; il ne faut ni sçavoir la musique ni avoir de la voix; mais Je ne voulois point qu'il fût question ni de l'ancien ni du nouveau testament; passe pour l'ancien et nouveau parlement, l'exil, le retour, la Joye générale, la mienne en particulier, enfin tout ce qui vous auroit passé par la tête, excepté L'événement dont il y a 1774 ans, mais vous n'en sçauriez perdre le souvenir, tout vous y ramène; Je ne veux pas plus des trois rois que de la crèche, du boeuf et de l'âne.
Vous ne me parlez Jamais de votre santé; dite moy, si vous prenez toujours de la casse, c'est le seul remède dont je fasse usage; mais depuis quelques tems je m'apperçois qu'elle me laisse quelques petites douleurs d'entrailles, et qu'elle ne remédie point à mes insomnies; nous devenons bien vieux, mon cher amy; vôtre âme ne vous en averty pas; la mienne ne vieillit pas à proportion de mon corps; ma mémoire cependant s'affoiblit beaucoup; celle du Président est presque totalement perdüe, ainsy que ses jambes; du reste il à fort bon visage, et dit quelques fois d'assez bonne choses;http://www.e-enlightenment.com/item/voltfrVF1190112b_1key001cor/txt/001 ce seroit pour moy un Grand plaisir de me retrouver avec vous; si j'avois exécuté le projet que j'eux il y a quinze ans de m'établir en Province, Je vous aurois rendu des visites; mais aujourd'huy je suis trop vieille pour songer à changer de place; je resteray dans ma cellule, lisant vos ouvrages, vous Ecrivant quelques fois, et vous aimant jusqu'à mon dernier moment.
Je vous ai pardonné toujours vôtre fureur contre la philosophie, pardonnez moi la mienne contre la cohue des enquêtes.
J'attends avec impatience vôtre dom Pédre, et tout ce qui l'accompagne; on Loüe extrêmement un petit Ecrit sur La raison; La mienne s'accomode bien de la vôtre, Je voudrois toujours vous lire, et c'est le parti que je seray forcée de prendre; car malgré vos magnifiques Eloges, Je ne trouve ma félicité particulière que dans ce que vous faites.