Ce Dimanche 24e Juin 1770 Si je ne vous ay pas Ecrit plûtôt, c'est que J'attendois toujours que la grand maman, me dicta quelques choses pour vous; Je l'en ay pressée, mais elle est dans une paresse d'esprit, dont on ne peut la tirer; elle s'en rapporte à moy pour vous dire, tout ce qu'elle pense pour vous; Je seray donc son indigne interprette mais J'auray le mérite de vous dire la vérité, en vous assurant que ses sentimens ne se bornent point à l'admiration et à l'estime, qu'elle y joint une très véritable amitié; elle voudroit vous satisfaire sur toutes les choses que vous désiré, et nommément sur votre affaire de st Claude; elle trouve la cause que vous deffandé très juste; mais elle ne peut vous secondez que par ses représentations et ses sollicitations; elle est aussy reconnoissante et aussy contante que moy, des Cahiers que vous nous envoyé, et nous vous prions de continuer; Je seray encore du tems sans revoir cette grand maman; elle ne reviendra que le dixsept ou le dixhuit de Juillet; et peu de jours après, elle partira pour Compiegne; La vie se passe en abscence, on est toujours, entre le souvenir et l'espérance; on ne jouïs Jamais; si du moins on pouvois dormir, ce ne seroit que demy mal; dormez vous, mon cher Voltaire?
Ne confondez pas, je vous prie, l’or faux avec le véritable.
Il ne faut pas qu'il y ait deux hommes de ce mêtier dans une nation, mais il faut qu'il y en ait un; je me repends d'avoir dit autrefois trop de mal de luihttp://www.e-enlightenment.com/item/voltfrVF1050232_1key001cor/nts/005; il y a un plaisir bien préférable à tout celà, c'est celui de voir verdir de vastes prairies, et croître de belles moissons; c'est la véritable vie de l'homme, tout le reste est illusion.
Je lui ay fait voir votre lettre, et comme il verra ma réponse, je n'ose vous dire tout ce que Je pense de lui; Jugez en par les preuves que J'ay de la préférence qu'il vous donne sur tout ce qu'il a Jamais vû, entendû et connû; c'est ainsy que moi votre plus grand admirateur; il a un fond de mélancolie qui me donne encor avec lui de grands rapports; ce sera pour moi une véritable perte quand il retournera dans son paÿs; vous seriez étonné si vous voyez ce qu'est devenû le nôtre, J'en suis honteuse vis àvis des étrangers; ce n'est plus une chose flateuse pour vous aujourd'huy qu'il n'i ait plus que vous que l'on puisse Citer dans notre nation.
Oh, c'est la véritable Eloquence!
Vous m’avez fait une véritable peine, mais mon cœur n’en est pas moins à vous.
'Je ne sçay pas pourquoy mr de Voltaire s'imagine toujours ètre mal avec mr de Choiseul; Je ne puis vous dire sur cela que ce que Je vous ay toujours dit, que mr de Choiseul ne cesse de lire ses ouvrages et de les admirer avec tout le plaisir que cause Une admiration véritable.
Une seule chose pourroit attacher à la vie, ce seroient de véritables amis, et c'est ce qui n'existe point.
L'adoucissement de cette malheureuse vie serait d'avoir auprès de soi, et sous sa main un ami qui pensât comme nous, et qui parlât à nôtre cœur et à nôtre imagination le langage véritable de l'un et de l'autre.
Tout est bon pourvu qu'on attrape le bout de la journée, qu'on soupe et qu'on dorme; le reste est vanité des vanitéshttp://www.e-enlightenment.com/item/voltfrVF1180419b_1key001cor/nts/010, comme dit l'autre; mais l'amitié est chose véritable.
Ce n'est pas la faute du Jesuite Menou si je n'ai pas eu Craon; je crois que la véritable raison est que Made de Mirepoix n'a pas voulû me le donner.
Vraiment, Madame, ce serait un beau jour pour moi, que le petit souper dont vous me parlez, avec mr le mal de Richelieu, et mr le Présidt Hainaut; mais en attendant le souper, je vous assure, sans vanité, que je vous ferais des contes que vous prendriez pour des mille et une nuit, et qui pourtant sont très véritables.