(1772) Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand to Voltaire
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(1772) Marie de Vichy de Chamrond, marquise Du Deffand to Voltaire

Pouvez vous croire que Je ne lise point votre enciclopédie?
J'ay été toute des premières à l'avoir. Rien de ce que vous donnez au public ne me manque, il n'y a que ce que vous confiez à vos plus confidents et plus intimes amis dont il faut bien que je me passe, soit dit en passant mon cher Voltaire.

Il y a long tems que nous avons parlé dans nos lettres du sujet que vous traitez dans votre dernière, mon instinct m'a toujours menée à penser tout ce que vous dites. Si nous nous trompons, ce n'est pas nôtre faûte, nous n'avons pour guide que nos sens, s'ils nous Egarent Je n'y vois point de remèdes.

Vrayment mon cher Voltaire, mon petit logement est bien à votre service, prenez moi au mot, hâtez vous de le venir occupper. Mais bon, si vous veniez ici vous me dédaigneriez bientôt, vous vous ennivreriez du faste de votre nombreuse livrée, et vous sçavez qu'elle ne m'aime pas.

J'ay Envoyé votre première lettrehttp://www.e-enlightenment.com/item/voltfrVF1220357a_1key001cor/nts/001 à la grand'maman. Je vais vous copier mot pour mot ce qu'elle m'a Ecrithttp://www.e-enlightenment.com/item/voltfrVF1220357a_1key001cor/nts/002:

'Dites à mr de Voltaire ma chère petite fille que comme la disgrâce n'ôte pas le goût, nous avons conservés la même admiration pour lui, mais que la circonspection que notre position Exige ne nous permet pas d'être en commerce avec un homme aussi célèbre, et qu'elle nous fait désirer qu'il ne parle de nous ni en bien ni en mal dans aucuns de ses Ecrits publics ou qui peuvent le devenir; que son silence est le plus grand Egard qu'il puisse marquer à notre situation et la marque d'amitié qu'il puisse nous donner à laquelle nous serons le plus sensible.'

Adieu mon cher Voltaire, il y a plus de 50 ans que Je vous aime, J'en ay peut être encore 4 ou 5 à vous aimer; c'est ma sentence que je prononce et non pas la vôtre.